lundi 19 janvier 2009

Antony & The Johnsons - The Crying Light

Il est des voix rares. Des voix qui transportent une foule d'émotions dans un seul vibrato. Celle d'Antony Hegarty en fait partie. A l'instar de ses héros Klaus Nomi, Boy George et Nina Simone, le New-Yorkais d'adoption, révélé à la face du monde en 2005 avec son album Mercury awardisé, I Am A Bird Now, a le trémolo passionné et douloureux, que d'aucuns interprètent comme de la prétention ou de l'affectation. Love it or leave it. Reste que beaucoup attendaient la suite avec impatience.

Antony avait annoncé la couleur en octobre dernier, avec le sublime EP Another World, teaser magnifique de l'opus The Crying Light qui sort demain.

Loin de l'introspection sur l'ambivalence sexuelle de I Am A Bird Now, The Crying Light est un superbe moment de philosophie et de poésie, une ode à une planète en détresse, un adieu déchirant mais résigné ("I need another world, this one's nearly gone" - "Another World"). Ecrites pendant les 7 dernières années, chaque chanson exprime toute la vulnérabilité d'Antony et de notre monde, déchiré par les guerres et écologiquement menacé.

Alors l'ambiance y est forcément sombre et triste à souhait. Mais, tout comme le co-fondateur du butoh, Kazuo Ohno, à qui est dédicacé l'opus et dont la photo illustre la pochette, tout est question d'élegance. Antony a renoué avec ses Johnsons, et dès l'ouverture sur l'élégiaque "Her Eyes Are Underneath The Ground", les arrangements de piano et de cordes éthérées (Nico Muhly n'est pas le protégé de Philip Glass pour rien) épousent à merveille la ferveur du chanteur. N'étant ni chanteur d'opéra, ni chanteur de jazz, Antony voit forcément sa musique classée en "pop". Mais sa musique est bien plus proche de la musique classique et symphonique, malgré l'apparition des guitares de Steve Cropper, que l'on découvre avec émerveillement sur "Aeon" (il faut croire qu'il a au moins momentanément surmonté son aversion). La chanson, aux accents glam bowiesques, a de plus le mérite, comme sa participation au projet disco dance Hercules and Love Affair, de mettre la voix d'Antony là où on ne l'attend pas.

D'autre part, malgré quelques envolées romantiques ("Daylight and the Sun" est un véritable monument de dramatisme), Antony a choisi la voix de la sobriété ("Dust and Water" est même carrément minimaliste), et fait, toutes proportions gardées, preuve de pas mal d'optimisme. Car, aussi fragile que soit le monde d'Antony, il y vit des danseurs nommés Epilepsy. Les accents bucoliques d'"Everglade", que John Barry n'aurait pas désavouée, transforment finalement ce chant du cygne en formidable cri d'espoir.

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Genre : rock indé, pop, soul
Label : Rough Trade
Date de sortie : 20 janvier 2008

1 commentaire:

  1. Merci. Après avoir lu cette chronique, j' écoute ce disque en boucle depuis hier.
    J'ai peur pour ma santé mentale, mais , bon:
    Tellement triste mais tellement beau !!!!


    Nicene

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